ILLUSTRATIONS DE CHARLES FOUQUERAY
PARIS
ERNEST FLAMMARION, ÉDITEUR
26, RUE RACINE, 26
CE LIVRE EST RESPECTUEUSEMENT DÉDIÉ A MESCAMARADES LES OFFICIERS DE MARINE FRANÇAIS.
Je n'aime pas la mode, un peu vaniteuse,des préfaces qu'on se fait à soi-même. Unroman nouveau n'est pas un si gros personnagequ'il faille le présenter au public selon toutesles règles du protocole. Encore, si la présentationservait de quelque chose! Mais de quoi?Un livre vaut ce qu'il vaut, et tous les avant-proposdu monde n'y changeront rien. En sorteque, tout bien pesé, l'auteur est sage qui s'abstientd'explications préliminaires, pour le moinssuperflues. Il ne s'agit pas d'ailleurs d'intentions;il s'agit de faits; de résultats. Ce qu'avoulu dire l'écrivain n'importe pas. Ce qu'il adit,—ce qu'il a écrit,—compte exclusivement.Or, le public sait lire. Et, à ses yeux, lameilleure de toutes les préfaces, la plus claireet la plus complète, sera toujours le livre lui-même.
Cela posé, voici néanmoins une préface. Jesens fort bien qu'elle est ridicule. Mais, je sensaussi qu'elle est, par extraordinaire, utile, indispensablepeut-être.
C'est qu'en effet, le livre que j'offre aujourd'huiau public n'est pas un livre nouveau. Uneédition populaire en a déjà paru, voilà deuxans, à peu près. Et cette première édition, jele constate avec plaisir et sans vaine modestie,obtint un succès assez général en France etmême à l'étranger.
Or, on s'en souvient peut-être encore et ceuxqui voudront bien feuilleter cette nouvelle éditions'en apercevront dès le premier chapitre,La Bataille est à peine un roman dans le vieuxsens du mot. La fiction n'y tient guère de place,et la fantaisie à peine davantage. L'histoire etla politique, par contre, y sont chez elles. Enoutre, un sinologue voulut bien discuter lavraisemblance des calembours chinois, dontcertains de mes dialogues sont fleuris. Et unamiral anglais me félicita d'avoir écrit, disait-il,«un très bon essai sur le tir de combat d'uneescadre». Tout cela m'oblige à admettre queforce gens, et non des moindres, ont fait à monlivre l'honneur très rare de le lire plus attentivementqu'on ne lit d'ordinaire un roman etd'attribuer quelque valeur documentaire auxaffirmations historiques et scientifiques qui s'yrencontrent. Auquel cas, me voilà bien forcéde m'expliquer brièvement là-dessus: car je nepuis accepter que, par ma faute, des opinionserronées aient pris naissance et conserventcrédit parmi des lecteurs trop littéralementconfiants. Je ne puis surtout accepter que, parma faute encore, des nations amies de laFrance et chez qui mon livre a trouvé des lecteurscurieux, ne soient pas persuadées,comme elles doivent l'être, de la haute estimeet de la juste admiration que j'ai toujours euespour leurs rares vertus, guerrières et pacifiques,et pour le splendide monument d'art etde civilisation que leur ont légué leurs ancêtres.
Je m'explique donc. Au surplus l'explicationsera courte.
En ce qui concerne la partie purement historiqueet technique de La Bataille, c'est-à-direles événements de la guerre russo-japonaise,compris entre les deux dates du 21 avril 1905et 29 mai de la même année, aucun détail durécit n'est, je crois, inexact. Quelques menueserreurs qui s'étaient glissées dans la premièreédition ont été rectifiées. Et je saisis cette occasionde remercier très respectueusem