MAURICE MAGRE
ROMAN
PARIS 6e
L’ÉDITION
4, rue de Furstenberg.
MCMXVII
OUVRAGES DU MÊME AUTEUR
parus dans la “Bibliothèque Charpentier”
Poésies.
Contes.
Pyschologie.
Théâtre.
Pour paraître prochainement :
IL A ÉTÉ TIRÉ :
Dix exemplaires sur papier de HollandeVan Gelder, numérotés de 1 à 10.
Huit exemplaires hors commerce, marquésde A à H.
C’est une chose très merveilleuse quede beaux yeux puissent pleurer desmilliers de larmes sans que ni leur éclatni leur couleur n’en soient altérés. Etne faut-il pas s’étonner davantage encoreque des cœurs charmants aient purenfermer des trésors d’amour et dedouleur, en aient répandu inlassablementla richesse, sans que les trésorssoient le moins du monde diminués ?
Ce n’est pas que les femmes souffrentmoins que les hommes, bien au contraire.Mais ce qu’elles jettent à laflamme dévoratrice c’est une substanced’elles qui donne beaucoup de lumière,un peu de chaleur, mais ne se consumepas.
Que l’on ne voie pas dans ces petitesnotes la moindre critique de ce que l’ona appelé la puissance d’oubli desfemmes. Parmi tant d’êtres qui s’aimaientet qui ont été séparés au commencementde la guerre, les femmes n’ont pasoublié plus vite, et si elles ont trahi lespremières, c’est que seules elles enavaient les tentations et les facilités.
La guerre nous a montré avec uneterrible évidence combien sont fragilesnos affections et combien ceux qui paraissentle plus semblables et qui sontliés pour une brève éternité, peuvent aisément,au bout de quelques mois d’éloignement,devenir différents et étrangers.
Que de femmes auront découvert,après la première épouvante de la solitude,que cette solitude a deux visages,celui de l’ennui et aussi celui de la liberté.Elles comprendront pour la premièrefois cette lueur qu’il y avait dansles yeux du mari ou de l’amant quandil disait le soir : Je vais au cercle et rentreraipeut-être tard. Elles comprendrontque si le baiser était hâtif sur la porte,c’est que le courant d’air de l’escalierapportait le souffle de la promenadesolitaire, de la rue où, précédé