LES SECRETS DE NOS PÈRES
RECUEILLIS
PAR LE BIBLIOPHILE JACOB
LA
CRYPTOGRAPHIE
OU
L'ART D'ÉCRIRE EN CHIFFRES
PARIS
ADOLPHE DELAHAYS, LIBRAIRE-ÉDITEUR
4-6, RUE VOLTAIRE, 4-6
1858
PARIS.—IMP. SIMON RAÇON ET COMP., RUE D'ERFURTH, 1.
Nous allons essayer de faire connaître quelques-uns des procédés mis enusage afin de permettre à des personnes séparées par des distancessouvent considérables, de communiquer entre elles, en recouvrant (p. 2)ces communications du voile du mystère.
Ces procédés forment une véritable science qui a reçu, comme tantd'autres, un nom tiré du grec.
La Cryptographie ou Stéganographie est l'art d'écrire de façon à déroberà autrui la connaissance de ce qu'on a tracé.
On peut s'efforcer de dissimuler l'existence de l'écrit. On emploie, ence but, les encres du sympathie dont nous parlerons plus tard, ou bienl'on tâche de cacher soigneusement le papier auquel on a confié sonsecret.
Mais plus habituellement on a recours aux divers procédés en usage afinde jeter, sur une dépêche qui peut tomber dans des mains indiscrètes, unvoile qu'on fait de son mieux pour rendre impénétrable.
Pour atteindre ce but:
On abrège les mots d'après un système convenu (c'est la Brachygraphieou Sténographie).
(p. 3) On fait usage des signes dont le sens est arrêté entre lescorrespondants: des lettres, des chiffres, des signes employés dans lesmathématiques et dans la chimie, des points, des lignes, des figuresquelconques ou de fantaisie, des couleurs, etc., sont d'une granderessource en semblable occasion.
On emploie des mots et des phrases, auxquels on convient de donner unsens tout autre que celui qu'on y attache dans le cours ordinaire deschoses.
Il y a toujours eu, il y aura toujours des secrets, qu'il faudra bienconfier au papier afin de les transmettre à des correspondants dont onest séparé par des distances plus ou moins grandes; mais on est bienaise de dérober aux investigations d'une curiosité indiscrète cescommunications mystérieuses.
Il a donc fallu recourir à des moyens destinés à voiler le sens desavis qu'on (p. 4) voulait transmettre. De là l'origine de l'écriture enchiffres.
De même que tous les arts, celui-ci débute par des essais naïfs etincomplets. Les écrivains de l'antiquité en ont conservé le souvenir.
De la Cryptographie chez les peuples de l'antiquité.
Hérodote nous fait connaître divers procédés un peu primitifs auxquelseurent recours, faute de mieux, certains personnages plus ou moinscélèbres dans les annales de ces temps reculés.
C'est d'abord un esclave dont on rase la tête, et sur la peau nue de soncrâne on trace quelques mots laconiques, mais d'un grand sens. On laisseaux cheveux le temps de repousser, et on expédie cette épître d'unnouveau genre à l'ami qu'il (p. 5) s'agit d'instruire de chosesimportantes. Les perruques n'avaient point été inventées à cette époque;elles auraient été d'une grande utilité en pareille circonstance. Il vasans dire qu'un pareil procédé n'est point susceptible d'une applicationfréquente.
Un seigneur de la Cour de Perse, ayant à transmett