Note de transcription:
L’orthographe originale a été conservée et n’a pas été harmonisée, maisquelques erreurs typographiques évidentes ont été corrigées.
LE ROMAN
DE
TRISTAN ET ISEUT
IL A ÉTÉ TIRÉ DE CET OUVRAGE
CINQ CENTS EXEMPLAIRES NUMÉROTÉS
SUR JAPON.
RENOUVELÉ PAR
JOSEPH BÉDIER
PROFESSEUR AU COLLÈGE DE FRANCE
OUVRAGE COURONNÉ
PAR L’ACADÉMIE FRANÇAISE
SOIXANTE-NEUVIÈME ÉDITION
H. PIAZZA, ÉDITEUR
RUE BONAPARTE, 19, PARIS
Tous droits de reproduction
et de traduction réservés.
A
MON CHER DU TERTRE
HOMMAGE FILIAL
JOSEPH BÉDIER
Ce travail de reconstitution de la célèbre légende française,d’après les fragments conservés des poèmes français du douzième siècleet leurs imitations étrangères, a été entrepris par M. Joseph Bédier,sur l’initiative de M. Piazza.
L’ÉDITEUR.
J’ai le plaisir de présenter aux lecteurs le plus récent des poèmes quel’admirable légende de Tristan et Iseut a fait naître. C’est bien unpoème, en effet, quoiqu’il soit écrit en belle et simple prose. M. J.Bédier est le digne continuateur des vieux trouveurs qui ont essayé detransvaser dans le cristal léger de notre langue l’enivrant breuvage oùles amants de Cornouailles goûtèrent jadis l’amour et la mort. Pourredire la merveilleuse histoire de leur enchantement, de leurs joies, deleurs peines et de leur mort, telle que, sortie des profondeurs du rêveceltique, elle ravit et troubla l’âme des Français du douzième siècle,il s’est refait, à force d’imagination sympathique et d’éruditionpatiente, cette âme elle-même, [II] encore à peine débrouillée, touteneuve à ces émotions inconnues, se laissant envahir par elles sanssonger à les analyser, et adaptant, sans y parvenir complètement, leconte qui la charmait aux conditions de son existence accoutumée. S’ilnous était parvenu de la légende une rédaction française complète, M.Bédier, pour faire connaître cette légende aux lecteurs contemporains,se serait borné à en donner une traduction fidèle. La destinéesingulière qui a voulu qu’elle ne nous parvînt que dans des fragmentsépars l’a obligé de prendre un rôle plus actif, pour lequel il nesuffisait plus d’être un savant, pour lequel il fallait être un poète.Des romans de Tristan dont nous connaissons l’existence, et qui tousdevaient être de grande étendue, ceux de Chrétien de Troyes et de LaChèvre ont péri tout entiers; de celui de Béroul, il nous reste environtrois mille vers; autant de celui de Thomas; d’un autre, anonyme, quinzecents vers. Puis ce sont des traductions étrangères, dont trois nousrendent assez complètement pour le fond, mais non pour la forme,l’œuvre de Thomas, dont une nous représente un poèm