Suppléments de ce numéro:
1° Une double page en couleurs: le Mont-Blanc.
2° Un portrait hors texte de W. Bouguereau.
Les délégués russes et japonais discutant, à Portsmouth(États-Unis), les conditions de la paix. La mobilisation àSaint-Pétersbourg: devant un bureau de recrutement.
LA PAIX OU LA GUERRE
Photographies prises à Portsmouth (États-Unis) par Grantham Bain, et àSaint-Pétersbourg par C.-O. Bulla.
Paris-Biarritz.
On est lâche... On a passé quelques semaines à jouir égoïstement d'unParis délicieux dont ceux qui vont prendre au loin leurs vacances nesoupçonnent pas le pittoresque et la grâce; on a savouré la paix de sesbeaux jardins désertés, de ses rues presque silencieuses; autour despetites tables des cabarets du boulevard on a pu choisir sa place, sanshâte, et commander son dîner à des maîtres d'hôtel que l'oisivetérendait affables; on a connu le sourire des cochers de fiacre... Encompagnie de «ceux qui restent», on s'est efforcé de médire trèsspirituellement de «ceux qui sont partis»; et puis, un beau jour, ons'éveille toute troublée; une vague curiosité vous prend, je ne saisquel besoin de changer de place,--une nostalgie de l'ailleurs.
Et l'on fuit Paris, comme l'ont fui tous ceux dont on se moquait laveille.
Mais suis-je bien sûre d'avoir fui Paris? Et, parmi ce branle-bas joyeuxde la «saison» commençante (la saison ici commence tard), n'est-ce pasParis que je retrouve, aussi vivant, aussi fiévreux et fumeux quejamais?
C'est dommage... Et j'imagine la chose à la fois grandiose et charmanteque serait un Biarritz à peu près solitaire, un tantinet sauvage; unBiarritz qu'ignorerait la mode; où, le long des rochers rouges, l'écumedû flot viendrait mousser et gronder, sans nul accompagnementd'orchestre,--devant un amphithéâtre silencieux de maisonnettes basquesaux façades toutes blanches, coiffées de tuiles.
L'industrie moderne ne permet pas ces choses. Elle entend «exploiter» lanature et utiliser ses beautés. Elle ne saurait souffrir que, pour lesspectacles coûteux où elle nous convie, tant de beaux décors soientperdus.
L'industrie s'est donc emparée de Biarritz et, si je n'aime pas beaucoupce qu'elle y a fait, je reconnais que, tout de même, ce qu'elle y a faitest très digne d'être admiré.
Elle a construit là des palais; elle a tracé, aux flancs de cettecolline, des avenues somptueuses et les a bordées d'hôtels princiers;elle en a, si je puis dire, discipliné les splendides végétationsnaturelles au gré de ses besoins; elle y a traité le fusain, le tamariset l'acacia comme nos coiffeurs traitent une chevelure ou une barbe.
Les rochers n'étaient pas partout, à Biarritz, d'une fréquentationcommode. L'industrie en a facilité l'accès; elle a pratiqué les«raccords» et donné les coups de lime nécessaires; et, cependant, elle asu conserver à l'ensemble du décor une apparence assez tragique pourqu'il fût possible au promeneur de goûter, parmi tant d'escaladesinoffensives, l'illusion flatteuse d'un petit